Nuit de Pouchkine est né de circonstances imprévues. Accompagnant le groupe Musicatreize lors d’une tournée en U.R.S.S., en novembre 1990, Ohana accepte le pari d’écrire en deux jours à Leningrad, une pièce susceptible de compléter un programme de concert modifié au dernier moment. Ayant à son répertoire de la musique ancienne, le groupe s’était adjoint un haute-contre et une viole de gambe. Ohana décide de les utiliser, choisit quelques vers de Pouchkine qui s’accordent à la grandeur et à la beauté du lieu, et compose sur le champ cette pièce, vision inspirée par le Cavalier d’Airain tourné vers la Neva, sous la lune pâle d’une Russie mythique, grandiose, à la mesure de ses immenses espaces et du prestigieux passé de Saint-Pétersbourg.
Quatre « moments » se succèdent dans cette pièce relativement brève : une ouverture solennelle en antiphonie entre solistes et chœur ; un dialogue serré entre voix de haute-contre et viole de gambe ; un grand aléatoire lunaire, immobile et miroitant ; une marche sourde et scandée enfin, comme venue du fond de la mémoire, colorée des sonorités des vers de Pouchkine, sur le nom duquel, comme une silhouette se perdant dans le lointain, la pièce prend fin.
Christine Prost